Hommage aux femmes qui ont marqué leur temps

Hommage aux femmes qui ont marqué leur temps

Le 9 et 10 décembre à Marseille
Régine Sellier (AFD Marseille) évoque l’œuvre d’Antoinette Fouque pour les femmes.

Extraits:
« Pour donner un lieu , un sol, aux femmes, elle a crée le MLF, elle a aussi crée un lieu où les femmes pourraient créer, écrire en fondant les Éditions des femmes en 1973, où chaque femme pourrait s’exprimer, exister, travailler à une écriture pour beaucoup matricielle et qui ne serait pas matricide, mais qui a à voir avec le don de vie et le lien premier, d’amour avec celle qui a donné et sculpté la vie, où des écrivain-e-s pourraient écrire sans refouler l’oral, le corps, la chair. Cette maison d’édition, première en Europe a eu une influence considérable puisque d’autres sont nées dans la foulée et que des collections femmes sont apparues chez presque tous les éditeurs. Elle a donné vie à la Bibliothèque des voix, (réalisation pionnière, qui a inspiré d’autres collections d’œuvres enregistrées ?) avec les plus beaux textes portés par des voix qui nous concernent et nous emportent. (…)

Elle a créé des journaux , revues et des librairies à Paris , Lyon et ici à Marseille, rue Pavillon à deux pas du Vieux Port, où nous allions, attirées par ce qui s’y passait, ce qu’il s’y pensait, des réunions, des rires, des paroles de femmes, l’organisation de manifs, de tracts, au milieu de livres qui donnaient la parole aux femmes pour la première fois. Quelle aventure ! Celle de d’interrogations sur nous même puisque c’était notre identité de femmes qui nous rassemblait, celle de nos solidarités joyeuses et graves.

On doit aussi à Antoinette Fouque d’avoir donné le sentiment que tout est possible, qu’il suffit d’avoir du cœur , du courage (c’est le même mot), d’avancer, sans peur, sans haine. Elle nous a donné la fierté d’avoir participé au mouvement de libération des femmes pourtant si diffamé, mouvement qui est heureusement reconnu aujourd’hui comme un mouvement de civilisation, d’être fières de sa beauté, de sa force de pouvoir transformer le monde, d’avoir éprouvé la force et la joie de la solidarité pour sauver des femmes, là où Antoinette nous a entrainées c’est à dire dans le monde entier, pour les libérer, les défendre, les soigner, d’Eva Forest à Aung San Suu Kyi, Taslima Nasreen, Leyla Zana, les femmes russes, algériennes , bosniaques, iraniennes… et autres héroïnes dans le monde. (…)

Chacune d’entre nous qui l’a rencontrée, peut témoigner à sa façon de cette rencontre qui a changé nos vies. Sa présence était immédiate, d’une force exceptionnelle, d’une écoute aiguë, elle entendait ce que nous disions, et le silence au creux des mots, les résistances. Elle avait le désir que nous soyons au travail, de pensée, d’action bien sûr, et d’attention à la vie psychique. Elle était analyste dans l’âme et profondément politique, faisant de tout instant, apparemment le plus anodin un moment de pensée et de gestes à accomplir. Elle éclairait les moments de vie quotidienne comme les grands moments de l’Histoire avec une acuité sans pareille, un humour irrésistible et un cœur généreux. Elle était une femme éveillée, vigilante, bienveillante, nous réveillant parfois de nos sommeils qu’on espérait confortables. Elle a élargi notre champ de conscience et de connaissance de nous même, femmes que je crois elle a rendues meilleures car réconciliées avec elles même et les femmes.
Que ses qualités de fidélité, de vigilance, d’intelligence, d’exigence du travail, de vérité, d’engagement pour la vie, de générosité incomparable, de gratitude et d’amour, demeurent vivantes en nous.
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